jeudi 9 janvier 2020

Le Kludde


In. Claude Seignolle, Les Evangiles du Diable, collection Bouquins, Laffont, Paris, 2e édition 1998
 
« Les paysans flamands, partie française y comprise, et brabançons connaissent un autre esprit du mal, c’est Kludde ! Ils tremblent le soir à la seule pensée de le trouver sur leur chemin en traversant les bois ou les champs. Les enfants hargneux ne se soumettent que lorsqu’on menace de les conduire à Kludde. 
 
Cet esprit est un véritable Protée : il prend toutes les formes pour parcourir la terre. Ici il se métamorphose en arbre ; d’abord très petit, il grandit ensuite à vue d’œil et disparaît dans les nues comme une ombre, renversant tout ce qui l’avoisine. Là il se revêt de la peau d’un énorme chien noir, se tient sur les pattes de derrière, court en secouant une lourde chaîne qu’il porte au cou, et saute sur les épaules de tous ceux qu’il rencontre la nuit. 
 
Parfois, Kludde est un vieux cheval maigre ; il devient alors l’épouvantail des garçons d’écurie et ceux-ci racontent qu’il leur arrive souvent, quand ils ont, le soir, conduit leurs chevaux à la prairie, d’enfourcher le matin Kludde, qui les emporte et va les précipiter dans un fossé. 
 
Kludde se change aussi en chat, crapaud, chauve-souris, ou tout autre animal. Les campagnards disent qu’il n’est pas loin quand ils voient sautiller dans les ténèbres deux petites flammes bleues qui sont, disent-ils les yeux du fantôme ; ils prétendent l’éviter en courant et en faisant des zigzags comme un serpent. Cet esprit a reçu le nom de Kludde du cri qu’il pousse : kludde, kludde. »

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