lundi 4 novembre 2019

Les « Demoiselles au Pompon rouge » de Ronarc’h


Qui étaient ces marins que l’on surnommait les « demoiselles au pompon rouge » auxquels les Dunkerquois sont si attachés ? Il y a toujours eu des troupes embarquées comme la Coloniale mais ces derniers n’étaient pas des marins, contrairement à la demi-brigade de l’Amiral Ronarc’h.
 
A la déclaration de guerre, il y a trop de marins pour les navires disponibles ! Que faire de ces hommes ? 

On les affecte d’abord au maintien de l’ordre à Paris et sa banlieue. Les débuts sont difficiles car l’intendance ne suit pas et leur chef, l’Amiral Ronarc’h, doit chaque jour trouver de nouvelles solutions pour l’équipement, les vivres... Un sacré chef d’ailleurs qui, atteint par la limite d’âge pour le commandement à la mer, fait tout pour rester avec eux.    

Au secours d’Albert Ier

Les premières missions ne sont guère valorisantes. Une fois que Paris n’est plus menacée grâce à la victoire de la Marne, ils se trouvent mêlés aux zouaves et ne combattent toujours pas ! Paris est leur berceau, les terres de Belgique seront leurs fonds baptismaux car les forts belges tombent les uns après les autres. 
 
Les Français acceptent d’envoyer des troupes au secours d’Albert Ier. Les Fusiliers-marins sont du voyage et c’est en sept convois que 6.500 hommes et 170 officiers mariniers partent vers Gand où ils se placent sous les ordres des Belges. Joffre refuse cependant que ces derniers, épuisés quittent leur front et laissent Français et Anglais sur place : leur gouvernement s’installe à l’Hôtel de ville de Dunkerque et les Fusiliers-marins prennent position à Dixmude au côté des troupes d’Albert Ier.


Sur l’Yser.
 
            L’Yser devient un fleuve de sang, les attaques allemandes sont féroces et les ordres stricts : il faut tenir jusqu’au dernier marin. La retraite est la seule décision qui ne soit pas envisageable! Il faut sans cesse réclamer des hommes et des officiers, car les pertes dues aux canons lourds allemands sont élevées. Ils tiennent mais c’est un régiment exsangue qui finalement se retire dans ses baraques du camp d’aviation de Saint-Pol et de Fort-Mardyck. L’équipement se fait plus complet grâce aux automitrailleuses blindées qui leur donnent plus d’autonomie. 
 
Le repos est de courte durée. En décembre 1914, il faut repartir en Belgique. Les marins ont à peine eu le temps de se remettre. Au Steenstraat, c’est pire encore. La situation sanitaire des fusiliers-marins est catastrophique car les Belges ont inondé la plaine. La presse vante leur courage, notamment les articles d’un marin, Pierre Loti, qui se plaint que la reconnaissance de la Nation tarde à venir : ces hommes n’ont même pas de drapeau alors qu’ils sont de tous les sacrifices ! Le président Poincaré remédiera en personne à cette situation en venant le leur remettre au terrain de Saint-Pol le 11 janvier 1915 mais, malgré les efforts de Ronarc’h, il trouve des troupes exténuées. Qu’importe ! Leur valeur est telle qu’ils remontent vite en ligne à la fin du mois.

L’Enfer de Nieuport.
 
            Les marins arrivent dans le secteur le plus embourbé et le plus exposé. Les  leçons de Dixmude ont porté : on attache un soin particulier au « confort » des hommes mais on sanctionne durement les manquements comme l’alcoolisme...Chaque jour, ce sont les bombardements, après Ypres, les gaz.. Poincaré vient rendre visite aux marins en avril. Les Allemands saluent son arrivée d’un obus inerte de 77, portant un message de bienvenue (les Prussiens savent recevoir !). Les pertes sont toujours aussi importantes et les réserves en hommes de moins en moins disponibles : pas assez de marins formés, plus d’officiers. Finalement, la brigade de Ronarc’h est en voie d’extinction. Elle est dissoute en novembre 1915 après avoir perdu plus 6.500 hommes. Il n’en reste qu’un bataillon qui garde le drapeau, formé à Malo-les-Bains mais il part immédiatement pour la Belgique et se distingue au Moulin de Laffaux en 1917. On retrouve aussi des fusiliers-marins aux Dardanelles, en Serbie, partout où la Marine a besoin d’hommes madrés au feu...
 
Quant à Ronarc’h, après avoir oeuvré dans le domaine de la guerre sous-marine, il est nommé au commandement des forces navales au Nord en mai 1916 et garde un oeil sur Dunkerque qu’il sauve de l’évacuation et de la destruction du port demandée par les Anglais en 1918, lors de la grande offensive allemande...
Et l’on s’étonnerait de la haute estime portée ici à ces hommes et à leur chef ?

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