Il fut un temps, pas si lointain, où les enfants
n’attendaient pas le Père Noel mais guettaient le passage de Saint-Nicolas et
de son âne, parfois accompagné de Zwart Piet, version flamande du Père
fouettard.
Nicolas est né à Patara, dans le sud de la Turquie, entre 250 et
270. Ce sont des temps de persécutions. Orphelin lors d’une épidémie de peste,
il se rend à Myre où, embrassant la carrière ecclésiastique, il succède à son
oncle comme évêque de la ville. Contraint à l’exil par les persécutions
ordonnées par l’Empereur Dioclétien, il ne revient à Myre qu’après l’édit de
Milan en 313 : l’Empereur Constantin autorise la liberté de culte et l’Empire
devient chrétien…
Nicolas serait décédé le 6 décembre 343 et inhumé dans sa
ville mais en 1087, des marchands italiens dérobent sa dépouille et l’emmènent
à Bari. C’est que ses ossements ont la réputation de suinter une huile
sacrée !
La légende se construit peu à peu. On rapporte quantité de
miracles, si nombreux et divers qu’il est aujourd’hui le saint patron de
nombreuses corporations, métiers ou groupes comme les enfants, les navigateurs,
les mariniers, les prisonniers, les avocats et les… célibataires, quasiment dans
toute l’Europe.
La part de miracle
Si son premier miracle aurait été de se tenir debout tout
seul immédiatement après sa naissance, le plus connu qu’on lui attribue est
d’avoir ressuscité trois petits enfants.
Comme dit la chanson, ils s’en
allaient glaner aux champs. Perdus, ils demandent asile à un boucher qui ne trouve
rien de mieux que de les tuer, les découper et les mettre au saloir. Sept ans
plus tard, Saint-Nicolas vient à passer chez le boucher et insiste pour goûter
le petit salé préparé sept ans plus tôt. Pris de peur, le boucher s’enfuit et
Nicolas ressuscite les petits martyrs.
Une autre légende affirme que pour le
punir, Saint-Nicolas l’oblige depuis à l’accompagner lors de ses tournées pour
punir les enfants qui n’ont pas été sages… Nous tenons là notre Zwarte
Piet ! D’autres histoires enjolivent la vie du saint : apprenant
qu’un père ne peut fournir la dot de ses trois jeunes filles et qu’il est
contraint de les livrer à la prostitution, le saint jette des bourses pleines
d’argent dans les bas qu’elles avaient mises à sécher sur la cheminée.
Aujourd’hui, le bas est rare, il est remplacé par la chaussette…
Les
hagiographes se seraient largement inspirés du dieu scandinave Odin. Ce
dernier, toujours accompagné de ses deux corbeaux qui voient tout et de son
cheval à huit pattes Sleipnir. Dans nombre de régions, Nicolas est accompagné
de son âne et de deux zwarte Pieten… Des assistants noirs comme les
corbeaux !
Les enfants, qu’ils craignent ou non de recevoir un bout de
charbon pour n’avoir pas été sages, n’oublient jamais de laisser un verre de
lait et des biscuits pour le visiteur et surtout des carottes pour l’âne.
Peut-être peut on aussi y voir les traces des offrandes païennes qui
permettaient d’entretenir une relation avec les dieux ? Mais comment s’en
étonner ? Pour convertir les peuples païens, les chrétiens ne faisaient
que reprendre des références communes à tous, d’y ajouter la patine chrétienne
et de faire en sorte que le souvenir des idoles s’efface, comme lorsque l’on
construisait les églises sur les fondations des anciens temples.
Autres temps, autres mœurs
Si certaines municipalités ont a cœur de perpétuer la
tradition en distribuant des friandises lors de la fête du saint, force est de
constater que les enfants attendent maintenant le Père Noël, autre avatar de
notre saint devenu bien facétieux.
En effet, Saint-Nicolas se transforme au
même rythme que l’Eglise. Les Protestants refusent l’idée de sainteté.
Saint-Nicolas redevient un homme parmi les autres. Aux Pays-Bas, bastion de la
Réforme, il a le nom de sinter Klaas, puis devient Santa Claus…
Ayant aussi
perdu ses habits sacerdotaux, son image s’oriente petit à petit vers celle que
nous connaissons… La presse américaine
forme lentement le personnage du Père Noël, Santa Claus outre-Atlantique… C’est
vrai qu’il a une bouille sympathique, le petit rondouillard, et puis au moins,
il est consensuel…
Les petits Dunkerquois le découvrent souvent au détour d’un
film ou d’une publicité mais pour un temps encore, Saint-Nicolas, le régional
de l’étape, résiste. Il faiblit après la seconde guerre mondiale et cède la
place au petit homme en rouge. La puissance américaine et la guerre froide font
le reste, inondant de films et de musique ses alliés, leur faisant adopter
leurs culture et valeurs. Saint-Nicolas est encore fêté mais reste terriblement
discret. Qu’importe : un saint sort par la petite porte, il revient par la
fenêtre… enfin par la cheminée… Reste le sapin à décorer, mais çà, c’est une
autre histoire, qui elle non plus, n’a pas grand chose à voir avec les
chrétiens qui, une fois n'est pas coutume, se sont accaparés une tradition germanique liée aux rites de fertilité.
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