Armand-Charles Guilleminot voit le jour à Dunkerque le 2
mars 1774. Mêlé aux troubles du Brabant en 1790 que la Maison d’Autriche
réprime avec violence, le jeune Guilleminot regagne la France où il s’enrôle.
Sous-lieutenant en 1792, il prend part à la bataille de Neerwinden mais dénoncé
comme complice de Dumouriez, on l’emprisonne avec quelques autres officiers à
la citadelle de Lille. Pour sauver sa tête, il s’évade et trouve refuge dans …
une autre armée.
Intégré à l’Etat-major de Pichegru, le voilà capitaine en l’an
VI, devient Chef de Bataillon pendant la campagne d’Italie puis aide de camp de
Moreau qui l’emmène sur le Rhin et y reste jusqu’à la Paix d’Amiens en 1802. Le
voilà attaché au dépôt de la guerre, mais il est impliqué dans le procès de ses
anciens chefs Moreau et Pichegru, compromis avec Cadoudal.
Etait-il parmi les
conjurés ? Nul ne put le prouver mais dans le doute, le Premier Consul le met
à la réforme et il ne peut reprendre son service qu’en 1805, au Grand Quartier
Général de l’Armée d’Allemagne, un pays qu’il avait soigneusement étudié avec
Moreau. Se rendant utile par sa connaissance de la topographie, il atteint le
grade d’adjudant-commandant. Polyvalent, il semble apte à toutes les tâches,
surtout à la diplomatie, ô combien compliquée avec les voisins de l’Empire.
Devant la "Sublime
Porte"
Guilleminot, affublé du titre de chargé d’affaires, se
retrouve diplomate auprès du Sultan à Constantinople. On avait poussé les Turcs
à la guerre contre la Russie, il s’agit maintenant de les calmer et de leur
conseiller de se rapprocher du tsar borgne, Alexandre Ier. La tâche est ardue,
pendant que Guilleminot tente de convaincre le Sultan de sacrifier ses
possessions sur le Danube, les deux empereurs se concertent pour dépecer l’Empire
ottoman. Guilleminot n’a pas plus de succès que son prédécesseur et finalement
retrouve les armes sous le commandement du Maréchal Bessières. Les guerres se
succèdent, les honneurs suivent : après la bataille de Medina del Rio-Secco,
il obtient une Brigade et la croix d’officier de la Légion d’Honneur, puis
guerroie en Italie en 1809, puis en Espagne l’année suivante. En 1812, il
participe à la campagne de Russie avec une brigade du 4e Corps et en
assure les fonctions de chef d’Etat-major pendant la désastreuse retraite. En
1813, il est nommé Général de Division et se distingue plusieurs fois, surtout
à Dessau contre les Suédois. En octobre 1813, il repousse avec le 4e
Corps les Bavarois sur un pont près d’Hanau.
Au service du Roi
La restauration n’est pas l’occasion de la retraite. Les
relations avec Moreau ou Pichegru de ce jeune général de 40 ans ne laissent pas
indifférent, encore moins ses états de service. Louis XVIII le nomme grand
officier de la Légion d’Honneur et chevalier de l’Ordre de Saint-Louis. Quand
l’Empereur débarque de son exil de l’Ile d’Elbe, le duc de Berry le choisit
comme chef d’Etat-major pour se porter contre Napoléon Ier, préparatifs rendus
inutiles par la fulgurante progression de l’Empereur déchu. Après les Cent
Jours, il est le chef d’Etat-major du Prince d’Eckmühl, puis il rejoint l’armée sur la Loire d’où il envoie sa
soumission au gouvernement royal. Ce dernier le charge de négocier les
frontières de l’Est de Bade au Piémont, en application des Traités. A son retour
en 1816, on le récompense avec le poste de Directeur général du dépôt de la
Guerre et il est nommé dans le Corps Royal d’Etat-major que Louis XVIII avait
créé en 1818. Quand en 1823, la France envisage d’intervenir en Espagne, on le
consulte et l’on adopte son plan mais une sombre affaire de cocardes et de
drapeaux portant les aigles impériales faillit mettre un terme à sa carrière. Faut-il
y voir la vengeance des partisans de l’Absolutisme auxquels il s’oppose ? Soupçonné,
il est alors protégé par le Duc d’Angoulême qui lui fait tant confiance qu’il
met son propre commandement dans la balance, lui permettant de mener une guerre
courte et victorieuse.
Les derniers honneurs
Elevé à la Pairie en octobre 1823, il reçoit le Grand cordon
de la Légion d’Honneur, la Grand croix de Saint-Louis et le poste d’ambassadeur
à Constantinople dès son retour d’Espagne, poste qu’il garde malgré le procès
où il est impliqué au sujet des fournitures de l’Armée en 1826. Alors que Paris
est en révolution en 1830, il continue de conseiller le Sultan et y reste
malgré les changements de gouvernements. Il commit l’erreur de conseiller les
Turcs de se préparer à une nouvelle guerre contre la Russie, ce dont
l’ambassadeur russe aurait eu vent. En juillet 1831, Louis-Philippe le rappelle
pour qu’il s’explique devant la Chambre des Pairs, où il évoque imprudences et
indiscrétions… mais fort heureusement, l’incident est sans conséquences. Ayant
gardé titre et traitement de Directeur Général du dépôt de la Guerre, il en
retrouve immédiatement les fonctions… Expirant en 1840, on inhume l’un des plus
brillants généraux français au Cimetière du Père Lachaise à Paris, laissant son
nom sur l’Arc de Triomphe de la Place de l’Etoile.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire