A Dunkerque, une rue porte son nom depuis 1814… Gui de
Dampierre fut le dernier des Comtes de Flandres encore indépendants du voisin
français.
De toutes les régions d’Europe, deux sont en avance :
l’Italie du Nord et … la Flandre. C’est qu’elle a des terres généralement
fertiles, des paysans entreprenants et des bourgeois entrepreneurs et audacieux
qui, en ville, ouvrent de nombreux ateliers. Pour des villes comme Hondschoote
ou Bruges, pour les ports comme Dunkerque, le commerce est vital… Les Comtes
comprennent parfaitement la situation de la Flandre, idéalement placée sur les
grandes voies commerciales.
Une émancipation tardive
Né vers 1226, Gui de Dampierre est proclamé Comte de Flandre
en 1253 par sa mère, Marguerite de Constantinople, mais il n’exerce réellement
le pouvoir qu’à l’abdication de cette dernière en 1279. Durant tout ce temps,
il apprend le dur exercice du pouvoir en suivant les ordres de
« Marguerite la Noire »…
Durant sa jeunesse, sa famille combat sans
cesse les visées de la famille d’Avesnes pour la succession aux Comtés de
Flandre et de Hainaut. Les deux familles se vouent une haine tenace mais acceptent
le compromis élaboré par Saint-Louis en 1256. Gui a déjà été emprisonné pendant
trois ans dans les geôles zélandaises après la bataille de Westkapelle sur
l’ancienne île de Walcheren, captivité que la paix n’efface pas… Il lui faut
gagner en puissance par la possession de nouvelles terres : en 1263, Gui
rachète à Baudouin II de Courtenay les droits qu’il a sur le marquisat de Namur
mais il entre en conflit avec Henri V de Luxembourg qui a conquis le fief
convoité par le Flamand.
La guerre commence mais les deux hommes se
réconcilient. Le traité de paix qu’ils concluent est scellé par le mariage de Gui
à la fille d’Henri, lequel renonce alors à ses droits sur Namur. Mais la
Flandre n’est pas le monde, les temps sont difficiles pour la Chrétienté. Les
Croisés ont perdu Jérusalem depuis longtemps et l’idéal des Croisades est un
pieux souvenir… Saint-Louis ne peut que vouloir reprendre la ville trois fois
sainte : ce qu’il a entrepris en Terre Sainte à la précédente croisade n’est
plus… Il décide donc une dernière expédition ultramarine. Sa flotte mouille
devant Tunis. Il met le siège devant la ville. Les Croisés subissent les
assauts de la peste. Le Saint-Roi des Français s’éteint avant de revoir
Jérusalem, la Croisade est morte sous le soleil tunisien… Gui de Dampierre peut
revenir en Flandre…
Le Lys contre le Lion
Comme Comte, il privilégie le commerce de la laine avec
l’Angleterre afin de garantir l’économie des villes drapières. Cherchant à
contrôler les finances locales, il se heurte aux échevinages trop jaloux de
leur pouvoir et qui prennent appui sur le Roi de France qui lorgne sur ces
terres voisines, si riches et si peuplées. Le petit peuple prend position pour
le Comte de Flandre, gardien de leurs intérêts. Les rois de France s’invitent
dans la politique flamande quand, en 1297, Gui tente de marier sa fille Philippine
à Edouard, héritier de la couronne d’Angleterre…
Quel fantastique ensemble
politique cela ferait ! C’en est trop pour le bouillant Philippe le Bel,
son suzerain, qui entre alors en Flandre, place des garnisons dans les villes
où il passe, se bat à Furnes et occupe le pays ! Gui, rebelle à ses
engagements vassaliques, est emprisonné après s’être rendu avec deux de ses
fils et cinquante chevaliers.
C’est sans compter sur la colère du peuple qui
gronde ! Au matin du vendredi 18 mai 1302, les matines de Bruges sont
sanglantes : toute personne suspectée d’être partisan du Lys de France est
massacrée par les fidèles du Comte. Il faut affronter l’armée royale. Trop confiants
face à la piétaille flamande, les chevaliers de Philippe le Bel sont massacrés
par les milices communales à la bataille de Courtrai le 11 juillet 1302. Ultime
affront, les éperons d’or de la fine fleur de la chevalerie française sont
alors pendus au plafond de l’Eglise Notre-Dame de Courtrai. Philippe le Bel tient
sa revanche ! En 1304, ses navires défont d’abord la flotte de Gui au sud
de la Hollande puis ses chevaliers écrasent les Flamands à la bataille de
Mons-en-Pévèle le 18 août, sous une chaleur caniculaire… Gui de Dampierre a,
depuis sa libération, confié le Comté à son fils Robert mais il est
impuissant : les Français ont déjà pris le contrôle des Flandres… pour un
temps ! Quant à Gui, il se constitue à nouveau prisonnier et meurt en
captivité à Compiègne l’année suivante. Gui , l’âme de la lutte acharnée contre
l’Ogre français, ne put garder la Flandre hors d’atteinte de son voisin.
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