Par M. PAGART D’HERMANSART, secrétaire-général de la Société
des Antiquaires de la Morinie, Saint-Omer, imprimerie et lithographie
H.D’Homont, 1893.
On a déjà décrit les ravages causés par les différentes
pestes qui sévirent à Saint-Omer pendant le moyen-âge et jusqu’à la fin du
XVIIe siècle, mais on a moins insisté sur l’ensemble des mesures que prenait
l’administration échevinale contre le fléau (voir Les Etablissements hospitaliers de Saint-Omer, par M.L. Deschamps
de Pas, Saint-Omer, D’Homont, 1887, p. 351 et suiv. – La peste à Saint-Omer en 1597 et 1636, par M. l’abbé Bled, Arras,
Laroche, 1892, in-12, 12 p.). Si pendant les premiers siècles où les épidémies
eurent une violence excessive, bien des précautions étaient négligées, plus
tard, le service des pestiférés se trouvait organisé avec un soin qui fait au
honneur au Magistrat (on appelle ainsi en Flandre le corps municipal). Nous
trouvons dans les archives communales notamment des détails précis sur les
mesures administratives qui furent prises en 1625. La peste qui éclata cette
année-là ne fut d’ailleurs ni une des plus terribles ni une des plus longues
que la population ait eu à supporter, puisqu’elle ne dura guère que six mois.
Dès le milieu de l’année 1623, l’état sanitaire du Nord de
la France était inquiétant, et l’échevinage de Saint-Omer prenait le 17 août
une délibération portant : « pour obvier la maladie contagieuse qui
règne de présent ès villes de Paris, Rouen, Dieppe, Beauvois, le tout au
royaume de France, défense de n’admettre aucunes personnes ny marchandises
provenans desditz lieux sous les peines etc. » (Registre aux délibérations du Magistrat Q commençant aux Roys 1621 et
finissant au deuxième de janvier 1626, p. 85) Mais en 1625, le fléau
s’était étendu et avait atteint Calais à quelques lieues de Saint-Omer, et
c’est en vain que le Magistrat fit le 2 juin un règlement prohibant l’entrée de
certaines marchandises venant de cette ville (Registre aux délibérations du Magistrat Q commençant aux Roys 1621 et
finissant au deuxième de janvier 1626, p. 168), deux mois après, le
faubourg du Haut-Pont fut envahi par la maladie, et le 8 août l’on reconnaît
que deux ou trois enfants y étaient morts de la contagion l’avant-veille.
Aussitôt l’échevinage prit les précautions nécessaires pour empêcher le fléau
de s’étendre, et pour organiser les
secours tant à domicile que dans les établissements hospotaliers que possédait
la ville.
Il fit le 20 août un accord avec un « porteur de corps
morts pestiférés », nommé Nicolas Ruyde, qui fut chargé de conduire les
malades à l’hôpital Saint-Adrien (C’était l’ancienne maison des Béguines, sur
le bord de la rivière Sainte-Claire, qui fut affectée vers 1523 au traitement
des pestiférés. Cet hôpital cessa d’exister vers 1750. Avant sa création, les
malades étaient secourus à domicile, in Deschamps de Pas, op. cit.), où des
sœurs les soignaient, et d’enterrer la nuit dans le cimetière de cet hôpital
(ce cimetière derrière le couvent des béguines était un emplacement qui avait
été acheté par le Magistrat vers 1523 pour en faire un cimetière pour les
pestiférés. Il faisait partie de l’amante de Saint-Bertin en 1753 – in Bulletin hist. T. VIII, p 283. C’est
aujourd’hui le marché aux bestiaux), « ou ailleurs en terre sainte, à une
profondeur de quatre pieds pour le moings », ceux qui décéderaient de la
contagion.
Autrefois la population avait eu à se plaindre de divers
désordres commis par les frères scelle-broders
chargés au quinzième siècle et pendant une partie du seizième, de soigner
les pestiférés et d’enterrer leurs cadavres, et le Magistrat avait du les
supprimer (Grand Registre en parchemin
aux archives municipales, 23 décembre 1523, f. 147 v°, et Etablissements hospitaliers de Saint-Omer, déjà cité, pp.
353-354. Ces frères étaient de l’Ordre de Saint-Augustin.) Il eut soin de
prévenir le retour de pareils scandales et il fit jurer au nouvel agent qu’il
instituait, d’exercer ses fonctions « sans aulcunement prendre ou mésuser
des biens qu’il trouvera ès maisons mortuaires ou aultres, ny pareillement
aller ou converser en sa maison avex sa femme maisme ny ailleurs que ès lieux
ou besoing sera pour l’estat du dit office ». De plus, on eut soin de
choisir un homme marié, et cet usage persista lors des épidémies postérieures.
Quelque grande fut l’utilité d’enterrer rapidement les
morts, l’enlèvement des cadavres ne pouvait avoir lieu « sans réquisition
de la personne à qui ce poira toucher, ou ordonnance de la part de Messieurs du
Magistrat. »
Le « porteur de corps morts pestiférés » devait
recevoir de l’échevinage 18 florins par mois, plus 30 sous par inhumation, qui
étaient aux frais des familles « ayant moïens » ; pour les
pauvres la ville versait 15 sous. En outre, on lui donna de suite « pour
denier à dieu » XXX s. et un demi-tonneau de forte bière. Il était tenu de
loger dans « une chambrette », hors la porte du Brûle, vers le moulin
de ma Mal-assise, et de porter un bâton rouge afin que chacun évitât de
l’approcher ; à lui-même était imposée l’obligation de s’éloigner
« en distance compétente » de tout habitant. Il lui était de plus
interdit d’avoir communication avec qui que ce fût pendant six semaines après
la cessation du fléau, et son salaire continuait à lui être payé pendant ce
temps. Le règlement du 20 août prévut les cas où ce porteur de corps morts ne
pourrait suffire à sa tâche, si par exemple, l’épidémie prenait une certaine
gravité ; il porte en effet « Et si l’on commect encore aultres
personnes ou dict office ou aultres choses en dépendant, icelluy Nicolas sera
tenu l’assister et faire tous les debvoirs requis pour l’exécution de leur
office de bonne foy ».
Si enfin, il venait à mourir dans le cours de ses pénibles
fonctions, la veuve devait être assistée par la bourse commune ou la table des
pauvres des églises (Les tables des
pauvres étaient des institutions charitables annexées à chaque paroisse,
gouvernées chacune par trois administrateurs annuels qu’on nommait tabliers. Ces établissements
correspondaient assez exactement aux bourses économiques de ces jours. Le
chapitre de la collégiale avait aussi sa table des pauvres).
Nicolas Ruyde n’exerça pas sans doute son office au gré du
Magistrat car il fut remplacé presque de suite, le 26 août, par Guillaume
Adrien et Anne Erson Robert, sa femme, et on l’obligea à « se tenir
pendant six semaines en l’une des hobettes ou chambrettes estant hors la porte
du brulle, vers le mollin de mal assise (Registre
aux délibérations du Magistrat Q, f. 177)
On prescrivit aussi le 4 septembre « dès maintenant et
pour l’advenir » de garnir les maisons des pestiférés « en haut de
l’huys, par dehors, sur la rue, d’une barre de bois blanc » très apparente
et les malades ne purent sortir sans porter « visiblement la blance
verge », à peine de cinq florins d’amende (Registre aux délibérations du Magistrat Q, f. 180). On ne leur
permettait de circuler dans la ville que de midi à deux heures et de deux
heures à quatre les jours de marché ; l’entrée des églises leur était
interdite et ils ne pouvaient entendre la messe les dimanches et fêtes que sur
l’emplacement des cimetières, qui, on le sait, étaient alors autour des églises
.
Le 4 septembre, un chirurgien de la ville, Georges du
Maisnil, fut chargé d’assister « tous bourgeois et habitans qui sont ou
poiront estre touchés » de la maladie contagieuse ; et un apothicaire
lui fut adjoint pour lui livrer « ce qui sera besoing à la charge de la
ville pour le regard des pauvres. » (Registre
aux délibérations du Magistrat Q, f. 180).
Le chirurgien fuit logé près du jardin de Saint-Adrien, il
eut quatre florins par jour dont le paiement devait lui être continué pendant
« les quarante jours après que de la part de Messieurs luy sera déclaré
que l’on le décharge de la sollicitude des infectez », et on lui avance de
suite cent florins sur ses gages. On lui fournit en outre cent fagots, trois
rasières de charbon et trois pierres de chandelles (La rasière équivalait à l’hectolitre 1/3 actuel. La pierre était tantôt de 4 livres ½ tantôt
de 6 livres , suivant la marchandise pesée. La livre ancienne de
Saint-Omer étant de 14 onces – Voir les Communautés
d’arts et métiers, Saint-Omer, Fleury-Lemaire, 1879, p. 172, 174, 175). Et
il fut exempt de « garde personnelle pour lui et ceulx de son maisnage, et
de logement de soldats ». On lui accorda encore 20 florins, valeur d’une
robe, et 20 autres pour denier à dieu « ou vin de ce présent
accord ».
Il était tenu « de visiter oculairement, traictier et
panser par ses mains tous malades infectez tant pauvres que riches ». Les
bourgeois « ayant moïens » lui devaient 20 pattars pour chaque
saignée, les « habitans médiocres, gens méchaniques vivant de leur travail
et manœuvres » seulement dix pattars. « ne lui sera payé aultre
chose » pour saigner les pauvres entretenus par les tables paroissiales,
bourses communes et hôpitaux.
Moyennant le même salaire, il devait faire « visitation
des corps morts réputés d’estre décédés du mal conttagieux touttefois qu’il en
sera requis, ou que lui sera ordonné par messieurs du Magistrat ». Son
salaire était fixé « selon la qualité des personnes, sçavoir XX s. pour les
riches, X s. pour les médiocres et pour les pauvres rien. »
Il pouvait fournir « les emplastres, cataplasmes,
applicatz et aultres medicamens » et s’en faire payer
« raisonnablement » mais les malades étaient libres de les faire
prendre à leurs dépens chez les apothicaires.
Les remèdes employés et en usage alors ne sont pas indiqués
d’une manière précise, et l’échevinage n’en recommande aucun, ce sont des
saignées, des emplâtres, cataplasmes « applicats et aultres médicamens
qu’il conviendra », dont la composition n’est pas mentionnée.
Les « physiciens » ou médecins, même ceux attachés
à la personne des princes qui avaient gouverné la Flandre et l’Artois, avaient
en effet édicté vainement des prescriptions variées, en recommandant, comme
moyen préventif l’usage du vin, des fruits aigres, d’infusion de surelle (c’est
la petite oseille) dans du vinaigre, de la triacle ou thériaque, l’abstention
de bains, etc. Le vinaigre était considéré comme un désinfectant, on
conseillait d’en aspirer souvent et d’en user avec tous les remèdes. Lorsque le
mal était déclaré, on ne connaissait guère que la saignée pratiquée à diverses
parties du corps selon les circonstances et les organes atteints les premiers
(Le tome X des Mémoires de la Société
d’Emulation de Roubaix (année 1888) contient p.221 à 241 un intéressant
chapitre sur la peste dans une étude intitulée les Médecins des pauvres et la santé publique en Flandre, par M.
Alex. Faidherbe. Voir un mémoire inédit de Lantaret sur la peste de Digne en
1629 qui fit périr les neuf dixièmes de la population. C’est un morceau
remarquable, au point de vue médical et littéraire, communiqué par M. Isnard,
archiviste des Basses-Alpes, au Comité des travaux historiques et scientifiques
(Bulletin historique et philologique,
année 1891n n°1, p.40 et suiv.) Dans la collection des Documents inédits sur l’histoire de France, les lettres de Peiresc
contiennent t.I, p. 728 et 741, t.II, p.176, des détails sérieux sur la peste
qui sévit de 1629 à 1632 dans le Midi et qui désola la ville d’Aix). Mais ces
remèdes n’avaient aucune efficacité, l’isolement des malades seul pouvait
diminuer l’intensité du fléau (On comptait aussi beaucoup sur la gelée pour
arrêter l’épidémie pendant l’hiver) et c’était la principale mesure que
prescrivait l’échevinage. Des ordonnances relatives à la destruction par le feu
ou à la vente et au colportage des hardes et vêtements des pestiférés morts
complétait l’ensemble des moyens employés pour empêcher la propagation de la
contagion.
Mais il ne suffisait pas d’édicter ces mesures, il fallait
en assurer l’exécution : l’échevinage s’adjoignit deux bourgeois pour y
veiller. Les sieurs Bulot et Thellier acceptèrent courageusement le 26
septembre la mission de visiter les maisons infectées et les hôpitaux et de
rendre compte chaque jour au Magistrat de la situation de l’épidémie. Ils
durent aussi faire sortir des hôpitaux les pauvres étrangers à la ville et de
les faire conduire hors des portes (Registre
aux délibérations du Magistrat Q, f. 182 v°) afin d’assurer des lits aux
habitants malades et de concentrer tous les secours au profit d’eux seuls.
On demanda également deux religieuses de l’hôpital de
l’escotterie au brulle « pour tenir leur demeure en lune des chambres de
la maison de Saint-Adrien, pour y assister ceulx quy se y seront rethirez pour
la contagion », et on fit « raccomoder deux petites maisons estants
du pourpris du jardin de St Adrien afin de s’en servir pour ceulx quy y seront
envoyez audit lieu pour la contagion (Registre
aux délibérations du Magistrat Q, f. 182 v°). On réussit peut-être ainsi à
enrayer le fléau, car la peste de 1625 ne fut pas très violente. Au mois de
novembre, l’archiduchesse infante, gouverneur général des Pays-Bas
(Isabelle-Claire-Eugénie, infante d’Espagne, devenue par le décès de l’archiduc
Albert son mari, arrivé le 13 juillet 1621, gouverneur général des Pays-Bas au
nom de Philippe IV) ne craignit même pas
de venir à Saint-Omer qu’elle quitta le 7. L’épidémie continua cependant, car
l’échevinage décida le 24 novembre de faire le
4 du mois suivant « pourches pour les pauvres infectez… ès maisons
des habitans » et il envoya vers l’évêque, le chapitre de Notre-Dame et
l’abbé de Saint-Bertin pour les prier de « contribuer quelque chose audict
effet » (Registre aux délibérations
du Magistrat Q, f. 196 r°).
Ces mesures préventives, ces prescriptions sanitaires et la
charité publique semblèrent avoir dominé complètement l’épidémie, puisque le 15
décembre, Messieurs autorisèrent le chirurgien commis aux pestiférés à
commencer le lendemain la quarantaine à la suite de laquelle il pourrait
reprendre la vie commune (Registre aux
délibérations du Magistrat Q, f. 199 r°).
Toutefois cette décision fut un peu prématurée, car si le
fléau sommeilla en quelque sorte pendant l’hiver, il se réveilla au printemps
de 1626 ; les archives communales (le registre qui suit 1625 manque et
nous n’avons pour guide que la table alphabétique des délibérations qui
présente diverses obscurités dans sa rédaction sur le point qui nous occupe
ici.) nous font savoir en effet qu’on dut nommer alors un nouveau chirurgien
pour visiter et soigner les pestiférés, il eut 20 patars pour chaque visite. Il
parût nécessaire d’isoler plus complètement les malades et on fit bâtir des
cabanes dans les terrains communaux voisins de la ville afin de les y loger. A
la fin de l’année, le couvent des Dominicains fut atteint, et on donna le 30
décembre à ces religieux une somme d’environ 150 florins pour les secourir. Les
Pères Jésuites, qui avaient également assisté les pestiférés, reçurent également
du Magistrat 300 florins pour les services qu’ils avaient rendus.
Le 27 janvier 1627 le chirurgien spécial fut libéré par
l’échevinage de ses obligations. Mais comme celui de 1626, le printemps de 1627
vit un léger retour du fléau. Cela n’empêcha point le gouverneur général
d’Artois de faire son entrée solennelle à Saint-Omer au mois de mai. Et la
peste disparut enfin.
Mais ce ne fut pas la dernière épidémie que la ville eut à
subir. La peste reparut dès le mois de juillet 1635 (Ms d’Haffrenghen n°878 à la Bibliothèque de Saint-Omer, t. I, p 221
v°), diminua un peu pendant l’hiver, puis reprit et devint terrible en 1636 (en
août et septembre 1636, on fit venir de Dunkerque successivement deux
chirurgiens pour le service des pestiférés : le Sr Pierre Vanderstraete et
le Sr Jean Sago – in Ms d’Haffrenghen
n°878 à la Bibliothèque de Saint-Omer, t. I, p 222. M. Deschamps dit que
les « deux personnes employées à porter en terre les corps morts de la
contagion étaient un ménage, mari et femme, que l’on payait exclusivement pour
ce service, in Etablissements
hospitaliers de Saint-Omer, p 360. (…) Le 12 octobre 1637, le porteur de
corps morts pestiférés ayant achevé sa quarantaine, fit chanter une messe en
musique en la chapelle Notre-Dame des Miracles, lui offrit un cierge de 12 à
15livres, fit célébrer à toutes les paroisses de la ville un service pour l’âme
de ceux qu’il avait enterrés et versa 300 florins à la bourse des pauvres, in d’Haffrenghen, t.I., p.236) pour durer
encore en 1637, et bien que le Magistrat eût mis en œuvre tous les moyens
résultant de l’expérience acquise lors des précédentes contagions, ses efforts
furent vains, treize mille personnes au moins furent victimes du fléau pendant
ces deux années. Il faut encore signaler les pestes de 1638, 1644, 1667 et
1668.
En terminant cette petite notice, nous croyons pouvoir
ajouter quelques mots pour indiquer d’une manière plus précise qu’on ne l’a
fait jusqu’ici, quels étaient les saints invoqués contre la Peste dans le Nord
de la France.
On sait quel était le dévouement des prêtres séculiers et
des congrégations religieuses pendant les épidémies de peste, et on a vu que
l’échevinage n’hésitait pas à y faire appel. Pendant la durée de la contagion
pour implorer le ciel comme après sa cessation pour remercier Dieu, le clergé
était dans l’usage de faire des prières publiques et d’ordonner des processions
où l’on portait les châsses des saints patrons de la cité : Saint-Omer et
Saint-Bertin, ainsi que la statue de Notre-Dame des Miracles. Toute la
population et les magistrats s’associaient à ces manifestations. De plus,
depuis 1426 jusqu’au milieu du siècle dernier, on célébrait chaque année, dans
les principales églises de St-Omer, la veille de l’assomption, une messe dite de la cliquette , ainsi dénommée à cause
de l’instrument que les convalescents, encore assujettis à une sorte de
quarantaine, étaient tenus d’agiter afin qu’avertis par le bruit, les habitants
qui les rencontraient ne les approchassent point. (Derhelms, Histoire de Saint-Omer. p. 612)
Mais dans les contrées du Nord de la France, le saint auquel
était attribué le pouvoir d’apaiser et de détourner la peste était
Saint-Adrien. A Saint-Omer aussi, son culte fut répandu durant le moyen-âge, et
nous avons signalé le cimetière destiné à l’inhumation des personnes décédées
de maladies contagieuses qui portait son nom (M. Albert Legrand, dans le Bulletin histor. des Antiq. de la Morinie,
t. I, p. 46, dit ; « De nos jours, il existe encore dans l’ancienne
cathédrale de Saint-Omer un triptyque représentant sur l’un de ses volets le
glorieux martyr toujours dans le costume traditionnel que nous ont légué nos
pères. » Saint-Adrien avait un autel dans l’église du Saint-Sépulcre – in Bull. hist., t. VIII, p. 419).
En outre, au XVIIe siècle, saint Charles Borromée, canonisé
en 1610, et qui, lors de la peste de Milan en 1576, avait bravé l’épidémie et
porté des secours et des consolations aux malades, fut aussi imploré contre la
peste. Le 1er septembre 1636, on fit à Saint-Omer des processions
générales autour des remparts de la ville pour obtenir la cessation de la
contagion, et on y porta, outre diverses statues, celles de
Saint-Charles-Borromée (Ms d’Haffringhes,
déjà cité, t. I, p. 223, il mentionne « les images de N-D des Miracles, de
N-D du Rosaire, de saint Charles Borromée, saint Roch, saint Sébastien, Saint
Adrien, sainte Isbergues, les chefs de saint Bertin et saint Omer » et
autres reliques).
D’autre part, il existait à Béthune en Artois, depuis la fin
du XIIe siècle, une confrérie de Charitables
de Saint-Eloi, qui avait pour but de soigner les pestiférés, de les
ensevelir et de les porter au lieu de repos (Histoire de la confrérie des charitables de Saint-Eloi à Béthune depuis
son origine 1188 jusqu’à nos jours, par G. Beghin, Béthune, David, 1882).
Or, pendant la peste de 1668, « Monsieur Dessars, chanoine de la
cathédrale de St-Omer », d’après un des registres aux délibérations du
Magistrat, « at présenté de la part de la confrérie de St Eloy de Béthune,
une médaille d’argent doré portant l’effigie dudit soin » (Reg EE, f 71 v°
aux arch. municip. Délib du 12 avril) et à Messieurs du Magistrat de cette
ville » et on décida plus tard que cette médaille serait portée par les
échevins de Saint-Omer, commissaires pour la peste, à la procession et aux
offices qui devaient avoir lieu le 12 juin « pour remercier Dieu de la
délivrance de cette contagion, et y sera présenté une chandelle en offrande,
avec laditte médaille à l’honneur dudit saint et de St Charles Boromé, grands
patrons contre la peste » (Reg EE, f.75 v° aux arch. Municio. Délib du 9
juin).
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