NOTA : à peine formée par voie d'élection, comme il est logique durant la Révolution Française, la Garde Bourgeoise de Dunkerque, établie le 18 septembre 1789, connait quelques difficultés qui sont ici évoquées dans l'adresse de Coppens, qui dirige la Commune et qui montrent les limites de cette organisation naissante
MESSIEURS
Il paroit d’après votre arrêté
que c’est à tort que j’ai annoncé, que le
plus petit nombre de vous faisoit la loi dans votre Corps, & que le parti
le plus considérable murmuroit tout bas ; mais n’osoit se plaindre. Ce
n’est pas sans raison, Messieurs, que j’ai avancé cette assertion ; les 54
Signatures au bas de votre arrêté, ne font que me fortifier dans cette opinion,
& me persuadent d’autant plus, que ce n’est que par complaisance ou faîbless
que plusieurs de vous ont signé, ce qu’ils ne pensent pas.
Oui, Messieurs, je répéte que
plusieurs d’entre vous, m’ont assuré ce que j’ai dit dans mon Mémoire, si dans un
moment, où vous étiez réunis pour un
festin, ils n’ont pas osé se montrer contraire à une opinion qui n’étoit
pas la leur, ils ont sans doute été retenus par quelques considérations
particulières ; il est tout naturel quand on sert dans un Corps, de paroître
penser comme les autres, & sur tout comme ceux que l’on craint de
contredire, ou que l’on a intérêt de ménager.
Je ne les nommerai pas,
Messieurs, ceux qui m’ont donné pareille assurance : s’ils ont pu signer
le contraire de ce qu’ils manqueroient pas de le demantir ; mais si ma
prudence exige que je ne les décèle pas, je n’hésite pas à vous dire, que trois
de vous, qui sont membres cu Comité, ont déclaré qu’ils désaprouvoient votre
conduite : un d’eux surtout en a tellement été indigné, que le 26 septembre,
jour de l’adresse du Comité aux Députés des corporations, il a dit, qu’il ne
serviroit plus avec vous, à cause de votre inconséquence & de vos procédés
indécens & déplacés, & sur les représentations et exhortations de
quelques-uns de nous pour l’engager à exécuter vos foiblesses, & à ne pas
se porter à ce parti violent, qui vous eut fait tort dans l’esprit du public,
il a non seulement dit, que sa résolution etoit invariable, mais il y a
persisté dans des termes beaucoup plus fort que je crois superflu de répéter.
Quoique ce particulier, l’un des chefs de votre Corps, ait changé depuis de
sentiment, & cédé à vos sollicitations REITEREES, ce qui prouve la bonté de
son cœur, il n’est pas moins vrai, Messieurs, qu’il vous a blamés en présence
des personnes qui ne pourront me démentir.
Quant au jugement que vous portez
sur mon mémoire en le déclarant injurieux, indécent, insidieux, une foule de
conséquences qui résultent de vos arrêtés & discours, prouvent ce que j’ai
avancé ; je crois inutile de m’étendre davantage sur le même objet, ne
doutant pas que mon mémoire aura suffi pour désabuser le public, que vos vains
efforts ont tenté de prévenir contre moi.
Au surplus, Messieurs, qui vous a
donné le droit de me juger ? Vous êtes illégalement constitués, vous vous
êtes arrogés des pouvoirs qui sont une usurpation, vous vous êtes créés de
vous-mêmes sans l’avoeu & l’approbation de la Commune, que vous avez eu le
front de braver & d’insulter, en refusant de vous soumettre à la
délibération du 18 de septembre dernier, en méprisant le Comité qu’elle avoit
choisi pour exécuter ses volontés, & ne dites pas, Messieurs, que j’en
impose ! Votre arrêté du 23 octobre, & celui imprimé du trois de ce
mois, que vous venez de m’adresser, font la preuve de ce que j’ai avancé, quel
est donc mon tort envers vous ? Celui d’avoir été assez courageux pour me
défendre, afin de prévenir l’effet des insinuations dangereuses que quelques
uns de vous ont répandues sur mon compte pour m’aliéner l’esprit du peuple,
& de ceux qui ne doivent trouver dans ma conduite que la fermeté d’un
citoyen zélé pour le maintien des droits des ses commettans.
Ce n’est pas moi MM. qui me suis
donné le droit de désaprouver votre conduite, c’est vous-même, c’est la Commune
assemblée qui m’a choisi membre du Comité, ce sont les membres de ce Comité qui
m’ont honoré de la première Présidence : ma qualité subsiste toujours,
& aussi longtems que la Commune ne s’assemblera pas pour recevoir ma
démission, je conserverai le droit de m’opposer aux efforts que vous faites
inutilement pour vous maintenir dans un despotisme qui doit être reprimé ?
Ce n’est pas mon mémoire qui est
indécent, c’est votre conduite à mon égard qui mérite cette qualification. Vous
aviez le droit de vous plaindre & de demander justice si vous vous trouviez
insultés& vous n’aviez pas le droit de me juger ; ce droit appartient
seul à la Commune que je respecte & que vous bravez, je ne puis mieux lui
prouver tout mon dévouement qu’en l’assurant qu’aussi longtemps qu’elle
laissera subsister les pouvoir qu’elle m’a donné, je lui serai fidel ;
& que rien au monde ne pourra m’intimider quand il faudra embrasser sa
défense.
J’ai l’honneur d’être,
MESSIEURS,
Votre très-humble &
très-obéissant Serviteur,
Signé, COPPENS,
Président du Comité de la Commune
Dunkerque le 5 Novembre 1789
* * *
A Dunkerque, de l’imprimerie de
E. LAURENZ, Place-Royale.
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