In Général Jean MILOT – La citadelle de Lille, reine des
citadelles – Société de Géographie de Lille – Lille, 1967
« Suivant les usages du
temps, on échangea les otages. Boufflers livra Monsieur de Belle-Isle,
brigadier, le lieutenant-colonel de Chamerac, du Régiment de Châteauneuf, et
Monsieur de Bussy, Major. Le Prince Eugène remit entre les mains des défenseurs
le brigadier Wartensleben, le lieutenant-colonel Hamilton et le major Ranck. Le
9 décembre, après des pourparlers que l’intransigeance des députés hollandais
fit traîner en longueur, la capitulation était signée.
A quelques modifications près,
Boufflers obtenait pour la place ce que sa glorieuse défense lui avait permis
de proposer. Le 11 décembre, l’état-major et toutes les troupes « tant
françaises qu’étrangères » de la citadelle sortiraient par la Porte
Dauphine avec armes, bagages et chevaux, tambour battant, balles en bouche,
mèche allumée par les deux bouts et des munitions de guerre pour tirer chacun
« dix coups », et les enseignes déployées, « six pièces de canon
dont trois de douze livres et trois de huit livres » et des munitions pour
tirer douze coups de chaque pièce, pour se rendre tous ensemble à Douai par le
plus court chemin, et en un ou deux jours, aussi au choix des assiégés, sans
que, sous quelque prétexte que ce soit, on puisse leur faire prendre une autre
route et il leur serait « donné une escorte suffisante de la part des
Alliés, tant pour la sûreté de la Garnison que pour celle des équipages ».
Les Alliés s’engageaient à fournir les voitures « et les bateaux
nécessaires pour le transport de l’artillerie accordée, comme aussi pour les
malades, blessés et bagages ». Les blessés et les malades hospitalisés en
ville depuis la capitulation de Lille partiraient avec le convoi, à condition
d’être transportables ; sinon, tout comme les blessés de la Citadelle, ils
seraient dirigés sur Douai aux frais des Alliés dès que leur état le permettrait.
Avant le départ de la garnison, on se rendrait réciproquement les prisonniers
faits pendant le siège de la Citadelle : ceux que les Alliés avaient
internés dans des « places plus éloignées » seraient renvoyés à Douai
dans les dix jours. Messieurs de Saint-Martin, de Tournin et de Maillebois
seraient laissés à Lille comme otages pour les dettes contractées au nom du
Roi. Les officiers, les ingénieurs, « les employés et tous autres qui
se » trouvaient « dans la citadelle » pourraient faire prendre
en ville « les meubles et effets » leur appartenant et les emmener à
Douai par le convoi, ou au cas où la place manquerait, ils pourraient les
laisser à Lille jusqu’à ce qu’ils eussent « trouvé la commodité » de
les faire passer à Douai ou à Tournai aux frais des Alliés. Les Alliés
fourniraient à la garnison avant son départ deux chariots et ils ne pourraient
« prendre connaissance de ce dont ils » seraient « chargés ni
les visiter sous quelque prétexte que ce fut ». Enfin on emporterait deux
jours de vivres tirés des réserves de la Citadelle.
Conformément aux termes de
l’article premier, deux heures après la signature de la capitulation, un poste
des Alliés prenait possession du corps de garde de la Porte Royale. Le 10, dans
l’après-midi, le Prince Eugène vint rendre visite à Boufflers parmi les ruines
de la Citadelle : on dit qu’il se jeta dans les bras du vieillard qui,
pendant quatre mois, l’avait arrêté devant Lille.
Le 11 décembre vers onze heures
du matin, par un temps « de gelée très rude », l’héroïque garnison,
défilant devant les Alliés rangés en bataille, sortit de la Citadelle par la
Porte Dauphine avec tout le cérémonial que lui accordaient les termes de la
capitulation.
Le Prince Eugène, ayant Boufflers
à ses côtés, regarda passer cette troupe glorieuse qui, mal équipée et mal
habillée après plus de cent jours de combats, en imposait à ceux qui l’avaient
réduite mais non vaincue. Tandis qu’elle s’acheminait vers Douai, le Prince
Eugène fit monter dans son carrosse Boufflers et ses deux intrépides
lieutenants, la Frézelière et Luxembourg, et les emmena dîner en son
quartier-général de Loos.
A la même heure, le brigadier
Huffelt entrait dans la citadelle dont il avait été nommé Gouverneur.
Pour la septième fois de son
histoire, Lille venait de changer de maître. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire