In H. Malo « Une grande légende
de la mer, Jean Bart », La renaissance du Livre, Paris, 1929, 230 pages, pp 9 –
12
« Il s’appelle Jean Bart. Il
est né à Dunkerque le 21 octobre 1650, d’une longue lignée de marins. Depuis deux
siècles, les Bart pullulent dans la marine de ces quartiers. Ils s’illustrèrent
dans la guerre de course et s’allièrent aux familles portant les noms des plus
fameux corsaires de Dunkerque.
De son bisaïeul, Michel Jacobsen,
le roi d’Espagne fit un vice-amiral après lui avoir chargé le cou de deux
lourdes chaines d’or. Les Hollandais le baptisèrent le Renard de la Mer pour
tous les tours qu’il leur joua. Il reçut en Espagne de somptueuses funérailles.
Un grand oncle, Jean Jacobsen :
il commandait le Saint-Vincent ;
le 2 octobre 1622, à onze heures du soir, il sort d’Ostende en compagnie de deux
capitaines espagnols. Les amiraux Herman Kleuter et Moy-Lambert bloquent la
côte. Ils détachent neuf bâtiments qui tombent sur le Saint-Vincent. Au lieu de le soutenir, les Espagnols s’enfuient.
Jean Jacobsen coule le vaisseau-amiral de Kleuter, qui se sauve à la nage, Moy-Lambert
accourt à la rescousse. Après treize heures de lutte, le Saint-Vincent, foudroyé par l’artillerie adverse, fait eau de
toutes parts ; quarante combattants survivent, cent quarante ont péri. Les
Hollandais montent à l’abordage et promettent bon quartier à qui se rendra.
Trente-deux acceptent ; ils n’en seront pas moins pendus. Jean Jacobsen et
les huit braves qui restent groupés à ses côtés chargent l’épée à la main les
soixante Hollandais qui ont pris pied sur son navire. Bientôt, les Dunkerquois
ne sont plus que quatre, puis que trois. Leur capitaine hurle crie aux siens
réfugiés sur les navires ennemis :
- Amis, si quelqu’un d’entre vous échappe et qu’il
retourne un jour à Dunkerque, qu’il dise à nos compatriotes comment nous nous
sommes défendus et que nous avons généreusement répandu notre sang pour la
cause de Dieu et du roi.
Il donne l’ordre de mettre le feu
aux poudres et vole en l’air avec son navire.
Un mousse, qui ne l’a pas quitté,
saute aussi et miraculeusement, échappe à la mort. C’est Gaspard Bart, oncle de
Jean. De longues années après, il mourra de ses blessures en même temps qu’un
autre capitaine de Dunkerque, après avoir attaqué un vaisseau de vingt-huit
canons.
Devant Monte-Christo, en
Méditerranée, un autre capitaine Bart, toujours de la même famille, est tué le
27 août 1652 en jetant ses grappins sur le vaisseau de l’amiral anglais
Badiley.
Le 22 novembre 1644, sept
frégates dunkerquoises sous le commandement d’Antoine Davery attaquent trois
forts vaisseaux de Hollande escortant une flotte de vingt-trois navires marchands.
L’une d’elles a pour capitaine Michel Bart, le grand-père de Jean. Le combat
est rude, la flotte marchande enlevée et les vaisseaux d’escorte s’enfuient.
Mais six jours après Antoine Davery et Michel Bart succombent à leurs
blessures.
Et Cornil Bart, père de Jean,
périt aussi de mort violente au cours d’un combat de mer.
Telle est la magnifique
ascendance du jeune marin qui, accoudé au bastingage, faisait avec lucidité la
critique des opérations de Ruyter. Il sera le grand homme de mer et le héros
dont la gloire éclipsera celle de ses ancêtres. Encore, la splendide lignée ne
s’arrêtera pas à lui ; elle donnera des héros à la France jusqu’au milieu
du XIXe siècle. »
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