In L’habitation ouvrière dans l’agglomération
dunkerquoise, CAUE du Nord,
Lille, 1981, 88 pages, pp16-17
« Au moment où de nombreuses constructions nouvelles s’élèvent
en notre ville, où de nouveaux quartiers vont se former, les soussignés ont l’honneur
de vous soumettre leurs réclamations sur l’état d’abandon dans lequel certaines
rues sont laissées depuis trop longtemps déjà. Sur la nécessité d’apporter dans
l’éclairage de la ville, d’urgentes améliorations. Sur les mesures qu’il
conviendrait de prendre pour assurer à tous les habitants de la cité un air pur
et sains, un libre et suffisant accès à toutes les demeures.
Lamentable état de certains quartiers.
Notre ville a toujours joui d’une réputation qu’elle a
longtemps méritée, en ce qui concerne l’état d’entretien et la propreté
remarquable de ses rues et quartiers.
Nous devons le dire avec regret, cette réputation est
gravement compromise depuis quelques années.
Il existe aujourd’hui des quartiers complètement délaissés ;
à un moment donné ces quartiers deviennent de vrais foyers d’infections, des
cloaques inabordables, contre lequel état toute la population proteste.
N’attendez pas qu’une épidémie vienne justifier cette
crainte générale.
Exode de notre
population
Depuis quelques années déjà, notre population ouvrière
émigre au dehors, ne trouvant plus à l’intérieur que des logements
insuffisants, insalubres, inaccessibles pendant les trois-quarts de l’année.
Elle se porte à Saint-Pol, à Rosendaël où elle trouve ce qui
lui est refusé en ville, des communications faciles, de l’espace, de l’air et
des logements convenables. La caisse municipale souffre la première de cette
émigration.
Le gouvernement impérial réclame partout pour la population
ouvrière l’assainissement des quartiers insalubres, de larges voies de
communication, une distribution d’air et de lumière, partout on voit les
centres se transformer.
Il ne sera pas dit que l’administration municipale de Dunkerque
reculera de deux siècles quand les autres devancent le progrès, qu’elle
entravera plutôt que d’aider aux efforts privés pour embellir la cité et donner
aux nouveaux quartiers le même aspect d’aisance et de propreté qu’elle avait
autrefois.
Le Jeu de Mail
Depuis le déplacement des fortifications, le Jeu de Mail s’est
transformé. Il est devenu un immense quartier où de nouvelles constructions s’élèvent
tous les jours.
Mais quel regret pour tout jamais que l’administration ne se
soit pas mis en rapport avec les propriétaires pour adopter un plan de
percement des rues.
Nous avons là un dédale de ruelles, de petits passages sans
aboutissans, ni débouchés.
Puis on peut déjà remarquer que, par suite d’exhaussements,
par ailleurs, des maisons sont envahies par les eaux à la moindre pluie ce qu’une
sage entente avec les propriétaires en temps utile, des alignements et des
nivellements, arrêtés dès le principe, auraient assurément évités.
Dans tout ce quartier, une seule rue a été ouverte, celle du
bâton, mais n’est-elle pas devenue un bourbier inabordable, un cloaque infecté
pendant tous les hivers ? L’écoulement des eaux ménagères n’y est pas
assuré. L’état croupissant de ces eaux chargées de toutes espèces de matières
pendant l’état, devient un danger permanent pour le quartier.
Cette rue n’est pas éclairée, ce qui en fait un vrai
coupe-gorge, la nuit. Il est temps de porter remède à cet état de choses, nous
le réclamons avec insistance.
On peut voir ce que les autres villes font pour leurs
nouveaux quartiers : pourquoi en serait-il autrement à Dunkerque ?
A la Citadelle
Dès l’établissement du chemin de fer, le mouvement du port se porta du côté des quais
garnis de rails, c’est-à-dire vers la Citadelle.
Il y a là sept rues d’accès aux quais ; trois seulement
sont praticables.
Celle qui conduit à la place de la Citadelle n’est qu’une
fondrière, les deux qui la suivent ne sont que d’affreux bourbiers pendant huit
ou neuf mois de l’année.
La rue Poudrière de la Marine sert de dépôt d’immondices, de
fruits gâtés, de mâchefer provenant des bateaux à vapeur qui stationnent au
débouché de cette rue.
Un pareil état demande un remède immédiat.
Ces rues sont des voies communales. Il est urgent de les
mettre en état de pouvoir servir à la circulation, de les assainir et de les
rendre à leur véritable destination/
En basse Ville
Un certain nombre de rues n’ont que des chaussées de
gravier.
Pour la plupart, les accotements ne sont pas garnis bien que
l’écoulement des eaux y soit ménagé.
Mais la rue du Canal-de-Bergues reste à l’état de route de
terre souvent impraticable sur une
partie de son parcours.
La rue St-Bernard est restée aujourd’hui à l’état de
bourbier infect, sans égouts, sans aucune apparence de gravier ou de pavés ;
elle n’est même pas éclairée.
Son extrémité vers l’abattoir sert de dépôt d’immondices. De
plus, il importe que des constructions élevées contre l’alignement obligatoire
de cette rue, soient reportées à l’alignement fixé par la loi.
Ile Jeanty
De ce côté, il y a
beaucoup à faire. Au-delà de la gare, il existe un quartier complètement
abandonné, couvert d’habitations établies sans ordre, sans trace de rues, sans
communication avec le centre que le passage établi sous le viaduc du chemin de
fer souvent couvert d’eau une grande partie de l’année.
Quant à la rue de la Garde, pourquoi l’avoir réduite à 15
mètres au lieu de 22 qu’elle avait et cette largeur primitive de 11 mètres
serait à peine suffisante pour la grande
circulation à laquelle elle est destinée. L’administration doit se mettre en
mesure pour rétablir cette largeur car sur un côté n’existe encore aucune
habitation.
Cette route du Four-à-Chaux qui sera bientôt bordée de
maisons vénérables demande à être mise au plus tôt en état de viabilité. On
doit y assurer l’écoulement des eaux de la rue de la Gare si l’on veut éviter
de voir ces rues transformées en bourbiers chaque hiver comme cela se produit
chaque année jusqu’à aujourd’hui.
Derrière la marine
Il existe là une route
qu’on ne saurait appeler rue, où il se fait déjà un grand mouvement qui s’accroitra
considérablement avec le port agrandi.
Rien n’y est fait encore de ce côté : les terrains sont
libres. C’est le moment de s’assurer une voie de largeur suffisante et c’est
dès aujourd’hui qu’il faut y donner une solution favorable.
En ville
Signalons encore en ville, les rues de l’Est, du Levant, de
la Porte d’Eau laissées dans un état d’abandon déplorable.
Puis des réformes urgentes sont à opérer dans l’éclairage
général de la ville, et notamment dans celui des quais et des bassins du port.
A certaines époques de chaque lune, le gaz est éteint à une
heure peu avancée de la soirée. Quelquefois, il n’est pas allumé du tout par
mesure d’économie sans doute malgré les graves inconvénients que cela présente.
Il est temps de porter remède à pareille situation ;
des malheurs tout récents ont démontré une fois de plus le danger de ne pas
éclairer la nuit entière. Si certaines rues peuvent rester dans l’obscurité
pendant une partie de la nuit, il n’en reste pas de même autour des bassins. On
n’y circule qu’avec crainte. Faut-il attendre de nouvelles victimes pour
obtenir une autre distribution d’éclairage ?
Au résumé
Nous demandons que notre administration municipale fasse
procéder sans délai à la mise en état de viabilité de toutes les rues anciennes,
nouvelles, grandes ou petites, restées abandonnées aujourd’hui.
Que le réseau des égouts soit complété partout où il n’a pas
encore été étendu.
Que les fils d’eau soient établis où ils manquent et que les
nivellements et alignements soient déterminés partout où ils ne le sont pas.
Que l’éclairage soit répandu dans tous les quartiers et
enfin qu’une plus juste répartition soit faite des deniers de la caisse
municipale. Moins de somptuosité dans les constructions… »
Pétition des habitants
au Maire de Dunkerque
1864
Publiée dans L’Union
Faulconnier en 1931
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