En Flandre, Artois, Hainaut, si un nom éclipse ses homologues, c'est celui de Vauban... Il eut cependant des prédesseurs dont certains ne laisserent pas comme seul souvenir leur marque dans la pierre et la brique. L'un d'eux, le Sieur de Beaulieu, nous a laissé un fantastique témoignage des conquêtes françaises de Louis XIII et Louis XIV grâce à ses plans et gravures... Retour donc sur un ingénieur militaire dont l'oeuvre monumentale a fait tomber la biographie dans l'oubli...
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In D. Buisseret « ingénieurs
et fortifications avant Vauban, l’organisation d’un service royal aux
XVIe-XVIIe siècles », CTHS, coll. Géographie, Paris, 2002, 142 p, pp
115-117
Cet ingénieur eut une carrière
presque aussi mouvementée que celle d’Argencourt. A l’âge de 16 ans, il se
signala au siège de La Rochelle. Devenu commissaire d’artillerie, il servit aux
sièges de Privas et de Pignerol en 1630. Vers 1636, il commença à travailler à
Paris sous la direction du graveur Jacques Callot. Ce fut peut-être à la suite
de cet apprentissage qu’il publia le
Recueil de plusieurs dessins de fortifications et de machines, pour tracer
toutes sortes de forteresses avec leurs parties tant extérieures qu’intérieures
(Paris, 1639). Il servit ensuite aux sièges d’Hesdin 1639 et d’Arras 1640. Mais
une commission royale formée à l’occasion du second siège témoigna que l’artilleur
Beaulieu devenait topographe :
« Le Roy, voulant faire
lever le plan du camp et des travaux faicts tant par les ennemis dedans Arras
pour la circonvallation de la dite place et pour les attaques d’icelle […] et
Sa Majesté estant bien informée de la capacité et expérience dudit Beaulieu,
ayde de camp en ses armées, et l’un de ses ingénieurs ordinaires, l’a commis et
ordonné pour se transporter incontinent et en dilligence en ladite ville d’Arras,
et y estant, lever le plan de tous lesdits campemens, lignes et retranchements
de la circonvallation, contrevallation, attaque de la place et defence d’icelle. »
Beaulieu servit ensuite à
Perpignan (1642) et à Rocroi (1643). D’après Mireille Pastoureau ce fut vers
cette époque que Louis XIII, arrivé à la fin de sa vie, lui demanda de graver
des vues de batailles et lui en accorda le privilège à Perpignan en mai 1642. En
fait, Richelieu voulait aussi se servir de la gravure pour faire connaître les
hauts faits des armées françaises et avait fait appel à Stefano della Bella. Beaulieu
servit encore à Courtrai, Furnes, Mardyck et Dunkerque (1645), mais il avait eu
le bras droit emporté d’un coup de canon et il dut penser qu’à l’âge de 33 ans
il ferait mieux de se consacrer à ses dessins qu’il traça désormais de la main
gauche.
Il mourut en 1674, après avoir
préparé deux ouvrage qu’on appelle « les petits Beaulieu » et « les
grands Beaulieu ». Les petits Beaulieu décrivent quatorze régions
géographiques – y compris le Brabant, la Catalogne, la Flandre et le Luxembourg
– en utilisant le système adopté par Tassin dans la série de Plans et Profils. Cette façon d’analyser
un pays dans des documents à grande échelle, – en utilisant, pour chaque province, des plans de villes et
des cartes de « gouvernement », donc du pays environnant – , était
probablement celle qu’avaient déjà adoptée les ingénieurs royaux. Tassin avait
recherché des cartes de ce genre préparées par les ingénieurs de Henri IV et
Beaulieu a dû avoir accès à des cartes élaborées suivant les mêmes méthodes.
Les conquestes de Louis le Grand (Paris 1694), appelées « Les
grands Beaulieu », forment, quant à elles, deux volumes de cartes montrant
les batailles auxquelles participèrent les armées françaises entre les années
1630 et la fin du siècle. Un grand nombre de ces documents nous offre les
images des batailles et sièges dirigés par les ingénieurs de Louis XIII (…). Chacun
des volumes contenant à peu près cent cartes, l’œuvre constitue une source de
premier ordre, « un ouvrage capital qu’il est indispensable de consulter
pour étudier l’histoire militaire » (Bourgeois et André les sources de l’histoire de France, p.
39). Mais à l’origine, c’était un ouvrage de propagande, publié pour faire
connaître les glorieuses conquêtes de la France.
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