In P. Pierrard, « Histoire
du Nord (Flandre, Artois, Hainaut, Picardie) », Hachette, collection
littérature, Paris, 1978, 404 pages, pp 27-29
Au début de sa deuxième année de
campagne contre la Gaule, c’est-à-dire au printemps de l’an 57 avant J.C.,
César, vainqueur des Helvètes et d’Arioviste, campe aux abords de Besançon.
S’étant assuré vers le Centre comme vers le Rhin, il se propose d’avancer vers
le Nord-Ouest, vers la Riche Bretagne. En face de lui : les valeureux
Belges qui, pressentant le danger se liguent autour du Conseil commun des
Belges, se donnant mutuellement des otages en gage de fidélité ; ils
pourront ainsi opposer un nombre considérable d’hommes valeureux
(2000.000 ?) à César.
Celui-ci est inquiet, car il
craint ces Belges qui, continuellement en lutte contre les Germains, sont des
guerriers redoutables. Dès qu’il peut faire du fourrage, il lève deux nouvelles
légions en Italie : elles viennent renforcer les six autres qui sont
installées sur l’Aisne, face aux Belges. Or, contrairement à ses prévisions,
César – il est vrai renforcé par les Eduens et les Rèmes (Reims) qui ont fait
soumission – a facilement raison des tribus belges, multitude désordonnée,
installée au sud des collines d’Artois : Ambiens (Amiens), Suessions
(Soissons) et même Bellovaques (Beauvais), réputés pourtant pour leur
vaillance. Il est vrai que l’exil des principaux chefs belges en Bretagne
insulaire et une révolution intérieure ont affaibli les adversaires de Rome ont
affaibli les adversaires de Rome dont les armées, admirablement entraînées,
peuvent se déplacer rapidement dans un pays découvert et fertile et déjà
parcouru de routes.
Reste les Nerviens, guerriers
redoutés pour leurs armes de jet – arcs, frondes, javelots – et leur épée courte : c’est un peuple de
chasseurs pauvres et austères, dont l’infanterie s’abrite, en campagne,
derrière des haies épineuses semblables à des murs. Dans un premier temps,
installés sur la rive gauche de la Sambre, les Nerviens, aidés par les
Atrébates et commandés par Boduognatos, s’emparent du camp romain. César jette
trois légions fraîches et se jette lui-même dans une bataille terrible où les
Nerviens – débordés – déploient un courage fabuleux, se battant sur
l’entassement de plus en plus élevé des corps de leurs amis morts. Quand la
bataille de la Sambre est terminée, il ne reste guère, de la vaillante tribu
des Nerviens, que les femmes, les vieillards et les enfants.
Dans la Gaule entièrement
pacifiée, seuls, en 56 av. JC, les Morins et les Ménapiens restent en armes.
César va les affronter dans leurs forêts et leurs marais du Nord : mais
une guerre incessante et coûteuse l’oblige à abandonner momentanément la
partie. Ayant échoué dans un essai de débarquement outre-Manche, le Romain fait
établir ses quartiers d’hiver (55 avant JC) chez les Belges. Un moment il
tremble, car les rudes Nerviens ont encerclé la légion de S. Tullius Cicéron
(le frère du grand orateur) : ayant appris, au contact des Romains, les
principes d’un siège rationnel, ils ont entouré le camp romain d’un rempart
haut de dix pieds et d’un fossé large de quinze ; des tours qu’ils ont
construites et qui dominent l’ennemi, ils lancent des balles de frondes
brûlantes qui mettent le feu au chaume des cabanes. Mais les Romains tiennent
bon et sont délivrés par une colonne de secours dirigée par César qui a été
prévenu par un Nervien, Vertico, passé dans le camp de Cicéron.
L’affaiblissement des Belges
devient évident ; les 300.000 hommes de secours qu’ils expédient vers
Alésia sont facilement dispersés par César. Celui-ci, en 51, doit quitter le
centre de la Gaule pour rejoindre le Nord où Ambiens, Atrébates, Calètes,
Bellovaques révoltés l’obligent à une guerre d’escarmouches d’autant plus
éprouvante pour lui que, entraînés d’abord par Ambiorix, vainqueur en Ardenne
de la légion de Sabinus, les survivants des Nerviens, les Ménapiens, et les
Atrébates et les Morins trouvent en Comnios l’Atrébate un chef valeureux. Mais
peu à peu les Belges s’épuisent ; les irréductibles – Comnios en tête –
passent en Bretagne. La sédition de 51, qui se renouvellera en 46 et même
encore en 29 et en 21 avant JC, a de moins en moins d’impact. Quand Auguste
devient empereur, la Gaule, et avec elle le pays des Belges, a décidemment
trouvé dans le Romain son maître.
Un maître qui est porteur d’une
civilisation – elle-même tributaire de l’hellénique – qui n’a pas alors son
pareil et qui, en pénétrant l’âme gauloise, va donner naissance à la
civilisation gallo-romaine dont nous avons hérité.