«Ce qui distingue les
nations, ce n'est ni la race, ni la langue. Les hommes sentent dans leur cœur qu'ils sont d'un même peuple lorsqu'ils ont une communauté d'idées, d'intérêts,
d'affections, de souvenirs, d'espérances. Voilà ce qui fait la patrie. Voilà
pourquoi les hommes veulent marcher ensemble, ensemble travailler, ensemble
combattre, vivre et mourir les uns pour les autres. La patrie, c'est ce qu'on
aime. Il se peut que l'Alsace soit allemande par la race et par la langue; mais
par la nationalité et le sentiment de la patrie, elle est française. Et
savez-vous ce qui l'a rendue française? Ce n'est pas Louis XIV, c'est notre
révolution de 1789. Depuis ce moment, l'Alsace a suivi toutes nos destinées;
elle a vécu de notre vie. Tout ce que nous pensions, elle le pensait, tout ce
que nous sentions, elle le sentait.»
Fustel de Coulanges,
L'Alsace est-elle allemande ou française? Réponse à M.
Mommsen, professeur à Berlin, 27 octobre
1870
Une fois l’émotion
passée, le retour d’une certaine idée de la Nation
Ces derniers jours, à la suite des attentats au siège de
Charlie-Hebdo et de l’Hyper-cacher à Paris, un mouvement populaire et politique
profond. Plus de 3 millions de personnes dans les rues, difficile de donner un
chiffre précis, des défilés et des rassemblements silencieux dans de très
nombreuses villes de France, auxquels ont répondu de même phénomènes un peu
partout dans le monde… et surtout, un parterre de chefs d’Etats et de
gouvernements en tête de cortège accompagnant le Président de la République,
première fois qu’un chef d’Etat de notre République Française défilait depuis
la Libération… Puis un discours du Premier Ministre à la Chambre des Députés,
non seulement acclamé à l’exception d’une députée de droite extrême, laquelle
bouda « La Marseillaise » unanime des représentants du Peuple.
Ensemble pour un hymne qui n’avait pas retentit en ces lieux depuis le 11
novembre 1918… A la fois des nouveautés et en même temps un retour au passé.
Certes, le discours du Premier Ministre aurait dû se faire devant les deux
Chambres réunies en Congrès à Versailles mais l’on ne peut blâmer l’émotion et
l’urgence du moment.
On constate d’abord que les attentats, contrairement aux précédents
amènent à l’idée d’une refondation de la Nation, telle que l’avait défini
Fustel de Coulanges en réponse à la thèse élaborée par Théodore Mommsen,
l’historien allemand. Certes, Fustel de Coulanges tout comme Ernest Renan
battaient en brèche la thèse du droit du sang qui se voulait justification de
l’annexion de l’Alsace et de la Moselle à la suite de la défaite française face
aux Prussiens et qui permit la proclamation du IIe Reich le 18 janvier 1871 en
la galerie des glaces de Versailles… est Français, est de la Nation française
toute personne qui désire vivre dans cette communauté en adhérant à ses idées,
ses intérêts, ses souvenirs, ses espoirs et ce sans différence d’origine ou de
croyance. La religion n’est donc pas un critère d’exclusion, tant quelle
celle-ci ne plaide pas pour la destruction de la communauté.
Les manifestations de ces derniers jours ne sont pourtant
pas nationalistes au sens actuel qu’on lui prête dans la politique française de
ces dernières décennies. La nation appartient à tous et ne peut être confisquée
au profit d’un seul parti, même si les autres formations politiques ont
tendance à oublier ou esquiver le concept qui fut le creuset de notre
communauté. Certes, il fallait parfois en désavouer les abus comme d’enseigner
aux peuplades des colonies africaines que leurs ancêtres « étaient des
Gaulois qui vivaient dans des huttes en bois » mais l’idée de fonder une
communauté unique, après tout, fondait l’action, que ce fut au fin fond de
l’Afrique comme au plus profond des Flandres ou du Berry où l’on tentait
d’effacer toute trace de régionalisme et de particularismes.
Finalement, les derniers événements ont pris une dimension
autant nationaliste que patriotique mais il faut aller au-delà des simples
apparences. Dans un concert quasi unanime de louanges, peu de louanges, peu de
temps pour une réflexion, il est vrai que tout le monde est dans l’émotion, la
douleur du moment. Des Français de tous âges, de toute condition, de toute
religion sont descendus dans les rues de France parce que des journalistes, des
dessinateurs, des policiers, des hommes, des femmes, connus ou anonymes sont
morts au nom d’un fanatisme aveugle qui veut réprimer la liberté de penser et
d’expression à condition toutefois qu’elle ne soit pas la leur. Certes, il y eu
union autour des morts de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher, mais la question
se pose : y aurait-il eu le même mouvement si les terroristes avaient
frappé la rédaction de Rivarol ou du journal Minute ? Car après tout, ces
organe de presse, plutôt à droite de la droite n’épargnent pas les Musulmans,
sans souvent distinguer les Islamistes des autres… C’est le capital sympathie
qui a joué entre un Wolinski toujours prompt à la gaudriole et Cabu qui allait
fêter ses 77 ans, avait gagné la sympathie de plusieurs générations, ayant même
participé à des émissions pour la jeunesse…
Le refus de céder au chantage, terroriste ou non, participe
de cette volonté de sauvegarder en France cet esprit qui a toujours caractérisé
la presse française, certainement l’une des plus libres en France et la
longévité de certains titres tels le Canard Enchaîné, né de la Grande Guerre,
en est une des plus parfaites illustrations… Mais il est vrai aussi que peu
d’organes de presse soient réellement indépendants des puissances politiques
comme de l’argent. C’est peut-être aussi pourquoi l’émotion populaire a été
aussi vive.
Comment faire reculer
les extrémismes religieux et politiques ?
Le moment de la réflexion politique, au sens premier du
terme (la vie de la cité, de l’ensemble des citoyens) commence. Non seulement
il faudra se poser immanquablement la question des moyens mais aussi des
limites à se donner à la lutte contre l’extrémisme, encore faut-il ne pas
cibler trop étroitement.
En effet, les dernières saillies d’Eric Zemmour sur l’Islam
et son renvoi d’I-télé posent problème : la censure n’est-elle pas plus
facile que de trouver de vrais contradicteurs capables de contrer ses arguments
souvent fallacieux ? L’on finirait par croire que les intellectuels font
défaut dans une partie de la frange politique. Il en est de même pour les Islamistes.
L’on dit qu’il faut combattre le feu par le feu. A la République, qui est
l’affaire de tous, de trouver aussi des voix capables de contrecarrer, de
contredire les discours de propagande avec les mêmes moyens que ceux dont usent
ceux qui se réclament du Jihad et non pas seulement tenter de réduire le
discours par la censure sur internet. Quand l’on sait que Daesh fait sa
propagande avec des images diffusées sur le net avec moult effets spéciaux,
caméras DV et en utilisant toute la gamme des clichés des films d’actions comme
des jeux vidéo, l’on doit se poser nécessairement la question de nos moyens de
communication. Il ne s’agit pas ici de combattre une contre-culture comme celle
des pacifistes durant la Guerre Froide mais bien de faire obstacle à un
discours porteur de mort et de destruction. L’Etat doit absolument se doter,
outre d’un arsenal répressif contre les terroristes et ceux qui ont font
l’apologie mais aussi se donner les moyens de contrer le discours.
L’Etat devrait donc s’inspirer de l’action de l’Eglise de
Rome qui contre les Cathares envoya les prédicateurs dominicains dont l’action
fut aussi importante que celle des chevaliers de la Croisade des Albigeois et
dont les prédicateurs combattirent aussi les Bogomiles Flamands.
Cependant, l’action violente n’est pas bonne, la
contre-réforme et les guerres de religion que nous avons connue en nos Pays-Bas
en témoignent. S’il faut convertir à la paix, il ne le faut qu’en gagner les
cœurs et les âmes mais pas seulement en isolant les gens qui incitent au crime
et à la guerre, il faut faire entendre un autre discours qui fasse synthèse de
la religion et de la République.
Il ne faut cependant pas perdre espoir. Après tout, l’Eglise
Catholique de France a mis des décennies à accepter l’établissement de la
République et la réduction voire la perte de son audience politique, et ce ne
sont pas les soubresauts de certaines factions intégristes qui, ainsi qu’on l’a
vu lors des manifestations contre le mariage pour tous, qui y changeront
grand-chose.
Une « certaine
idée de la France »
La France s’est constituée sur la base des mouvements
migratoires qui ont tous apporté une pierre à l’édifice qui constitue la Nation
aujourd’hui. Même les Celtes ne sauraient se prévaloir d’être des Français
d’origine, ils étaient eux-mêmes des peuples indo-européens. A la limite, les
Basques le pourraient puisque ce peuple n’a pas bougé de ses montagnes, mais le
cœur basque est basque avant tout… Il y a tant de strates qui composent la
population française, dont le territoire s’est constitué au gré des migrations,
des invasions, des guerres, des déplacements de population qu’il faut
finalement en convenir : la France est multiculturelle et rien ne peut
contredire cet état de fait. Ajoutons à cela que nos frontières ont toujours
été poreuses, de par nature et de par leur étalement, la France est un pays
ouvert au reste du monde, qu’il ait été exportateur d’idées comme celles des
Lumières ou qu’il en soit tributaire comme aujourd’hui avec la mondialisation
qui n’est pas qu’économique mais aussi politique et culturelle. Un pays ainsi
ouvert est une chance pour qui veut saisir les opportunités intellectuelles
comme culturelles qui circulent ainsi…
La France, pays des droits de l’Homme, s’est dotée d’un
grand nombre de lois permettant l’expression des idées et des pensées, même
parfois les plus extrémistes. La Liberté est essentielle aux Français,
d’ailleurs c’est l’un des trois mots inscrits aux frontons des mairies. Pour
garder cette liberté, faudra-t-il cependant se résoudre à une restriction de
cette dernière ? C’est fort à parier, même si pour l’heure l’on ne parle
pas de lois d’exception mais la prévention comme la répression connaissent leur
limites technologiques (nombre de terroristes utilisent largement la
stéganographie permettant de cacher un message dans un autre (par exemple dans
une image… On est loin des plans du Concorde passés dans de minuscules
microfilms) ou par le cryptage des données informatiques, en utilisant aussi le
piratage de données du net. Faudra-t-il donc se résoudre à une écoute
généralisée de nos communications et une lecture totale de tous nos
messages ? L’idée, orwellienne si elle en est, a déjà séduit les
Américains par la mise en place du PATRIOT Act mais la technologie se heurte à
un écueil de taille : les moyens humains. Sachant que la masse des
messages à traiter est immense, il faut l’automatiser par la recherche de
mots-clés, or ces filtres peuvent vite s’engorger par l’usage intensif dans
tous les messages de ces mêmes mots. Et combien même, encore faudrait-il avoir
les moyens en personnels pour traiter ces messages, les lire, parfois les
traduire, et déterminer le niveau à partir duquel il faut lancer l’alerte voire
la procédure. Et qui dit moyens techniques et humains revient à dire moyens financiers…
Les sommes à investir seront colossales, encore faudra-t-il les trouver…
Mais
cela n’est que le traitement en amont, un tel effort serait nettement
insuffisant sans la maîtrise du terrain.
Maitriser le terrain, voilà un concept plus politique que
militaire mais ne sommes-nous pas déjà dans un schéma de guerre asymétrique
tout d’abord en opération extérieure contre des groupes armés non identifiables
et ne répondant pas aux lois élémentaires de la guerre, ce que notre pays a
déjà connu en Indochine comme en Algérie mais aussi avec des terroristes qui
frappent au cœur du pays, qui n’est de fait plus sanctuarisé. L’on répondra
qu’il faut contrôler les frontières et donc nécessairement dénoncer les accords
de Schengen mais ce serait oublier que les auteurs des dernières frappes
étaient Français et ont toujours vécu en France, à l’instar des derniers
terroristes qui ont frappé dans le métro et les bus de Londres.
Ainsi sur le terrain, cela se traduit par le plan Vigipirate
renforcé, au niveau maximum, cependant il est maintenu en état depuis l’affaire
Kelkal en 1995. Au plus nous sommes nous habitués à voir déambuler dans les
gares des grandes villes et les aéroports des patrouilles mixtes police-armée.
Or la Police manque cruellement d’effectifs dans nombre de villes, le format
des armées depuis quelques années n’a cessé de se réduire. Tôt ou tard, il
faudra recruter ou faire appel aux réserves comme on le fait à certaines
périodes chargées de l’armée, ou se résoudre à étendre les heures de service
mais en tout état de cause l’on se trouvera à un moment donné confronté à la
question financière dans un contexte économique déjà fortement tendu.
L’on évoquera alors la vidéo-protection (terme politiquement
correct pour ne plus avoir à parler de vidéo-surveillance) mais là aussi, la
question se pose pour les moyens financiers et humains : qui surveillera,
qui analysera, qui interviendra et en combien de temps ? Ce n’est qu’une
surveillance, un moyen de veille, pas d’action, tout au plus les images
peuvent-elles être intégrées dans une procédure judiciaire or celle-ci ne peut
intervenir qu’a posteriori…
Faudra-t-il alors se résoudre à privatiser la protection des
populations ? Cela a un prix mais après tout, les armées françaises ont
déjà opéré cette mutation dans nombre de casernements, même pour monter les
gardes. En l’absence de conscrits, ce sont des sociétés de gardiennage, ainsi
que l’auteur de ces lignes a pu le constater un week-end à la citadelle de
Lille, pourtant Quartier Général du Corps de réaction Rapide-France, organisme
de l’OTAN ! Or, le garant de la justice reste la prérogative régalienne de
l’Etat et il semble donc inepte de la confier à des sociétés privées sans
contrôle (après tout, la privatisation des taxes parisiennes dans la Ferme
Générale avait été un des facteurs poussant à la Révolution de 1789, il
pourrait en être de même pour les fonctions de police)
Et le volet
répressif ?
Le débat se pose de savoir que faire des personnes
condamnées pour actes de terrorisme, incitation ou apologie : l’expulsion
du territoire est une solution mais elle ne vaut que pour les ressortissants
qui n’ont pas la nationalité française… La France n’extradant pas ses propres
ressortissants, les lois internationales interdisent de faire de citoyens des
apatrides.
La prison apparait à beaucoup comme la solution la plus
simple mais avec des prisons le plus souvent vétustes et surpeuplées (parfois
peuplées à plus de 150% des capacités), les excès prédicateurs sont
difficilement contrôlables. L’isolement de tels condamnés est donc
difficilement engageable par manque de place et par manque de personnels
pénitentiaires. De même pour une résidence surveillée, où il sera difficile de
surveiller 24h par jour et 7 jours par semaine un seul homme, alors des
centaines ?
Ouvrir des camps comme la détention à Guantanamo gérée par
les Américains est contraire aux idéaux humanistes français… mais si Guantanamo
a été rendu possible, c’est parce que le camp est à Cuba, dans une base
militaire, loin des côtes américaines et surtout loin des théâtres d’opération
d’où ont été prélevés les prisonniers. Mais les Américains ne semblent pas non
plus en la matière très regardants sur les lois internationales comme sur leur
propre corpus législatif, ayant promu des lois d’exception. D’ailleurs, le
PATRIOT Act est de plus en plus contesté au sein même des populations
américaines.
Il ne semble pas y avoir donc de solution à court et moyen
terme…
Les pires des risques
Tant qu’un seul d’entre nous ne sera pas libre, aucun
d’entre nous ne sera libre. L’on dit que seuls ce qui ne bougent pas ne sentent
pas leurs chaînes or les Français sont très attachés à leur liberté
d’expression qu’ils semblent redécouvrir à l’occasion des derniers événements…
Ce qui d’ailleurs peut laisser pantois car en ce mercredi 14 janvier, jour de
parution de Charlie-hebdo, un journal qui il y a encore une semaine était au
bord de la faillite, avec un tirage tri-millionnaire, l’on n’en trouvait plus
en kiosque, et ce même si la plupart des acheteurs de ce jour n’avaient
certainement jamais acquis auparavant.
L’on risque de tomber de Charybde en Sylla.
Le premier risque pire que la censure, c’est l’autocensure.
La loi n’y est pour rien, c’est la mode du politiquement correct où il faut
peser chaque mot, chaque lettre pour ne pas déplaire, pour ne pas tomber sous
le coup de la loi ou des menaces… L’on a donc depuis des années
considérablement épuré les champs lexicaux, les noms de produits, l’on a
expurgé les émissions voire les films de nombre de choses qui pouvaient heurter
des minorités, agissantes ou non. Bien
des générations se souviennent avec émotion de la liberté de ton des Jean
Yanne, Jacques Martin dans sa grande époque, du Petit rapporteur ou même des
Nuls… Où les pires « vacheries » étaient dites avec le sourire.
Aujourd’hui le discours est épuré voire aseptisé.
La tentation de la repentance se fait plus forte. Dans la
suite logique du politiquement correct, il faudrait céder à nombre de minorités
pour demander pardon pour les actes de nos prédécesseurs à l’instar de Juan
Carlos en 1992 à Grenade, s’excusant de l’expulsion des Juifs d’Espagne lors de
la fin de la Reconquista. L’on voudrait exiger des Français de s’excuser de la
colonisation, de la décolonisation, des Croisades, des massacres de Vendée et
de tant d’autres choses… mais ces professionnels de la repentance des autres
passent sous le boisseau leur propre histoire.
Ainsi, il n’est nullement besoin pour nous de nous excuser
de notre passé, il fait partie avec ses errements de notre Histoire.
L’autre extrémité dans lequel nous pourrions tomber, c’est
de tomber dans l’outrance, profitant de la liberté d’expression pour dire tout
et n’importe quoi et favoriser les extrêmes. La libération de la Parole ne
serait pas non plus, si elle devenait totale, porteuse de paix. Une affaire
donc à suivre et surveiller.
Et la place de la Foi dans tout
cela ?
Un jour, un interlocuteur belge me demanda au cours d’un
repas entre Flamands de France et de Belgique quelle était la définition que
j’avais de la laïcité, je répondis que c’était la liberté de croire en ce que
l’on voulait … ou de ne pas croire. Ma réponse l’avait satisfaite, aujourd’hui,
j’ajouterais que c’est aussi l’obligation de laisser croire ou de ne rien dire
à ceux qui ne croient en rien, car la laïcité, c’est aussi le droit à
l’agnosticisme comme à l’athéisme. Or, par chance et après bien des
vicissitudes, la France s’est dotée de la Loi de séparation de l’Eglise et de
l’Etat. Et cela ne s’est pas fait dans la facilité ni la bonne humeur,
notamment pendant la querelle des Inventaires, qui se solda par un mort à
l’église de Boeschêpe. Néanmoins, ce modus vivendi fonctionne parfaitement même
si le Ministre de l’Intérieur est aussi le Ministre des Cultes, car il faut
bien un arbitre et un interlocuteur au plus haut niveau de l’Etat. Reste le cas
des trois évêchés de Metz, Toul et Verdun encore sous statut concordataire (de
1801) puisqu’Allemands au moment de la loi de 1905. Est-il besoin de rappeler
que les débuts de la République étaient rudes avec l’Eglise de Flandre, les
sermons des prêtres étaient surveillés et que certains en Flandre étaient
emprisonnés pour avoir fait le prêche en Flamand, parfois dénoncés par leurs propres
paroissiens. Mais depuis l’ordonnance de Villers-Cotterêts, promulgué en 1539
par François Ier, la langue officielle est le français… Peut-être serait-il
utile de revenir à cet usage dans TOUS les lieux de culte et de rencontres
confessionnelles.
Les églises et leurs biens, après les tourments de la
Révolution Française qui fit entrer ces
biens dans le domaine national pour mieux les gager afin de financer les
assignats, leur restitution par la suite aux autorités régionales, ont été
répartis : les édifices et les objets datant d’avant la loi de séparation
reviennent aux communes, ceux qui ont été construits après restent aux
diocèses. Mais la question musulmane est au cœur d’un débat. Les communes et
autres entités territoriales peuvent-elles financer des lieux de culte (et donc
avoir un droit de regard sur leur usage et leur gestion) alors que cela exclut
les autres religions présentes en 1905, les religieux n’en gardant que
l’usufruit (ce qui est souvent une charge extraordinairement lourde pour les
communes, il suffit de demander à tous
les édiles de Flandre où les églises sont devenues surdimensionnées par rapport
au nombre de prêtres et surtout de fidèles et où un grand nombre d’édifices
cultuels sont classés ou inscrits aux Monuments Historiques). Après tout, la
cathédrale d’Evry ne date que de 1996 et échappe à la gestion de la commune.
Mais l’exception française porte en soi sa propre faiblesse
puisque certains cultes n’étant pas représentés, il se cantonne le plus souvent
dans la clandestinité (sauf à passer par une association de type loi 1901) et
donc reste source de problèmes.
Il conviendrait donc aussi, dans le respect de la laïcité
française, de ne pas revoir la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat, gage
de l’indépendance spirituelle et de la liberté de conscience mais de pallier
les manques inhérents à l’absence de certains cultes, devenus importants
depuis, notamment avec les phénomènes migratoires massifs. Après tout, il n’y a
dans l’armée française des Imams que depuis peu, il faut donc que l’Etat soit à
l’image de la société qu’il gère et peut être sera-t-il enfin temps de résoudre
le statut concordataire d’Alsace-Moselle au nom de l’unicité juridique
nationale. Après tout, la République, en théorie est une et indivisible… Je maintiens que la religion, voire la religiosité doit se cantonner à la sphère privée, pas plus question de voir une crèche dans une mairie que l'organisation des fêtes de ramadan par les autorités municipales. Après tout, les vacances, à l'image de ce que l'on voit dans le monde anglo-saxon, ont perdu leur référence religieuse. En ma jeunesse, l'on parlait des vacances de Noël et non pas les congès d'hiver. ce qui vaut pour les uns reste valable pour les autres.
Sur ces réflexions, je vous laisse, je vais tenter, comme le
pékin moyen, de réserver un exemplaire de Charlie-hebdo, même si je reste
viscéralement attaché au Canard Enchainé qui prendra, pour l’exemplaire de ce
jour, dans mes archives et en souvenir de mon commandant qui m’a tant souvent
enguirlandé et menacé de gnouf pour l’avoir régulièrement « oublié »
ostensiblement sur mon bureau de biffin…
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